Est-ce qu’un jour travailler pour l’intérêt général permettra de vivre dignement ?

19 janvier 2024

Loriane Roques - © Marion Herail

Comme vous le savez, il nous tient à cœur de partager avec vous nos projets, notre quotidien. Mais nous aimons aussi partager avec vous notre aventure entrepreneuriale, la défense de notre modèle SCOP dont nous sommes si fières, nos réussites et nos échecs.

Nous avons clôturé notre second bilan comptable en juin 2023. Celui-ci est très joli sur le papier : bénéfice, maîtrise des charges d’exploitation, pas de dettes fournisseurs etc. Mais la réalité fut toute autre.

Nous avons perdu notre trésorerie. Nous ne naviguions plus qu’à flux tendu, ce qui nous a obligé à suspendre les salaires des associées pendant 3 mois.

3 mois sans salaire, c’est énorme : 3 mois durant lesquels tu travailles tous les jours, rends des livrables importants, te rends à plusieurs reprises sur des projets qui ont lieu dans d’autres départements, continues à former des professionnel·les… Nous avons alors tenté de trouver des solutions : au niveau de la banque on a tenté de nous vendre des « produits », mais aucune solution pour améliorer notre situation.

Du côté de nos clients partenaires, nous avons été transparentes sur la situation et passé des heures à courir après les paiements. Parce que la réalité c’est que nos délais de paiement moyens sont passés de 29 jours en 2022 à 105 jours l’année suivante… alors que la réglementation impose un délai de paiement à 30 jours.

Nous avons vécu cela comme une injustice.

Déjà il est difficile de comprendre qu’on n’accepte de nous allouer les moyens de travailler (soit l’argent qui nous permet de payer les salaires) qu’après que le travail soit réalisé.  Mais en plus, comment justifier qu’une structure doive attendre 3 mois pour être payée de son travail. La lourdeur administrative ? La dématérialisation qui était supposée raccourcir les délais de paiement ? Le manque de personnel ? Nous n’avons pas de réponse. Et cette situation a occasionné énormément de stress, une perte de confiance en notre modèle, une perte de motivation…

Aujourd’hui, notre situation s’est stabilisée et nous ne manquons pas de travail. Nous avons des prévisions encourageantes et un carnet de commande bien fourni. Nous ne perdons pas notre optimisme et sommes convaincues d’avoir fait le bon choix en se lançant dans cette aventure.Nous continuons de vouloir travailler pour l’intérêt général, pour ce en quoi nous croyons profondément.

Mais nous allons devoir repenser notre formule. Peut-être emprunter et payer des intérêts, pour pallier les défauts de paiement dont nous ne sommes pas responsables.

Alors nous continuons de défendre le modèle de notre SCOP : le partage des fruits de notre travail, la gouvernance horizontale et le refus d’une société dans laquelle le capital commande toutes les décisions.

Mais ce n’est pas sans mal, et nous avons besoin de soutien et de partenariats qui prennent en compte les réalités de ce modèle. 

Une mention spéciale à notre merveilleuse équipe de salariées sans laquelle nous n’aurions pas autant de motivation.

 

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